jeudi, mars 19, 2009

Films numériques: note d'espoir


Le cinéma a connu un moment de rupture radical en passant du muet au parlant autour de 1930. La rupture entre l’ère du filmique-analogique et l'ère du numérique est un phénomène beaucoup plus vaste qui touche tous les domaines, en même temps la coupure est moins nette, du moins au cinéma. Je fais partie de ceux qui ne voient pas encore vraiment l’avantage du numérique par rapport à la pellicule. Il me semble qu’on ne fait qu’essayer de parvenir à mimer la qualité du 35 mm et je n’ai pas encore remarqué de chef-d’œuvre qui se distinguerait par une utilisation originale des possibilités nouvelles offertes par le numérique. Je suis peut-être encore trop prisonnier de l’ancien paradigme. Et bien je trouve au moins une certaine consolation dans ces mots optimistes de Roman Jakobson… de 1933 ! J’aime toujours voir, avec le recul, l’accomplissement d’une parole visionnaire. Disons-nous la même chose pour l’ère du numérique qui commence.

«Les mots d’ordre les plus courants sont ceux-ci « Le film sonore, c’est la décadence du cinéma», «cela limite considérablement les possibilités artistiques du cinéma», «die Stilwidregkeit des Sperchfilms», etc.

L’opposition au film sonore pèche surtout par ses généralisations prématurées. Elle néglige le fait que les phénomènes particuliers ont, dans l’histoire du cinéma, un caractère exclusivement temporaire, étroitement limité du point de vue historique. Certains théoriciens ont mis trop hâtivement la mutité dans l’ensemble des propriétés structurelles du cinéma, et ils se sentent offensé si le développement ultérieur de celui-ci s’écarte de leurs formules. Au lieu d’admettre que «tant pis pour la théorie», ils répètent le traditionnel pro facto.

Ils montrent, de nouveau, trop de précipitation s’ils prennent les qualités des films sonores d’aujourd’hui pour les qualités du film sonore en général. Ils oublient qu’il ne faut pas comparer les premiers films sonores avec les derniers films muets. L’état actuel du film parlant correspond au moment de l’occupation par de nouvelles acquisitions techniques (il paraît que c’est déjà bien si l’on entend quelque chose, etc.), le moment où l’on commence à rechercher de nouvelles formes. Le film muet avait traversé une période analogue avant la guerre, alors que le film muet de l’époque la plus récente avait déjà créé ses standards, qu’il en était arrivé aux œuvres classiques ; c’est peut-être justement dans ce classicisme, dans cet achèvement du canon que résidait sa fin et la nécessité d’une nouvelle rupture.»

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