mercredi, février 17, 2010

Bride of Frankenstein



Bride of Frankenstein, l'un des rares films compris dans une suite qui est meilleur que le premier (Frankenstein, aussi réalisé par James Whale).


À chaque fois que je vois ce film, je ne peux m'empêcher de penser à quel point notre actrice québécoise Catherine Trudeau (à droite sur le montage) ressemble à l'actrice Elsa Lanchester (à gauche). Avec la perruque, le maquillage et l'éclairage, ce serait identique. À quand le remake québécois? Peut-être un clin d'oeil dans Karmina 3 (quoique... on y tient peut-être pas non plus)?

samedi, février 13, 2010

Le cinéma en tant qu'être

Vampyr de Dreyer

«Il est extraordinaire que tant d’hommes aient confié tant d’images, tant d’affects, tant de constructions, tant de beautés à un support si proche, ontologiquement, de sa propre ruine.» -George Didi-Huberman


L'idée de cette citation m'habite. J'admire la sculpture et son éternité, pourtant c'est le cinéma éphémère qui me fascine. Mais qu'est-ce qu'un film? Pourquoi en faire? Pourquoi en voir autant? Pourquoi écrire sur le cinéma?


Jean Louis Schefer en est un qui a su se sonder à ce sujet avec un talent exceptionnel. Un autre auteur qui donne envie de ne jamais écrire. J'aime beaucoup quand il parle de flocons.


«Qu’est-ce après tout que ces «séances»? sinon des durées d’irradiation d’un être indifférencié (sur son savoir, ses souvenirs, sa classe et son langage) probablement déposé en nous, obstinément amputé de tout organe mais subsistant là puisqu’il ne cesse de commencer des mouvements, de commenter nos passions par ces ébauches de gesticulations qui nous endorment. Comme si, toute notre masse s’assoupissant, s’en détachait violemment et peu à peu cet être de désir ou cette créature d’objets qui peut toucher des images et acquiescer à leur réalité, quand même leur invraisemblance ne cesse de nous frapper, même si des stries, des saccades, de la «neige» les corrompent sans cesse et même si toute la couleur tourne à une lumière jaune. Et cet être-là, cet homme sans naissance, aurait-il besoin constamment de cette imperfection d’image ou de ces flocons criblant indifféremment un visage, une main ou un mur, de nappes de suie pour réclamer son existence ou toucher, par l’ébauche seule d’un mouvement, d’un commencement de désir, la matière dont il pourrait se composer (mais cet être inchoatif ne peut donc non plus durer puisque la brièveté de toute image, la disparition même du film le font disparaître).»

«L’image filmée – au contraire de toute autre représentation, comme la peinture – a une définition technique sensible dans sa perception, elle n’a pas de support fixe : je la vois parce que quelque chose (un écran coupant un faisceau) l’empêche de disparaître; elle n’est cependant ni tout à fait sur la pellicule, ni définitivement sur l’écran, ni réellement dans les rayons que projette la lanterne : je suis aussi l’assurance d’une transition des images, je suis donc autre chose que leur spectateur; je m’affaiblis en elles.»

L’Homme ordinaire du cinéma, Jean Louis Schefer

vendredi, février 12, 2010

Hiroshima mon amour, Montreal, 1960


Aimez-vous Vajda?
Arthur Lamothe
Cité Libre, XIe année, No 30, oct. 1960

Ce fut de la frénésie. Le Loew’s plein à craquer, la police à la porte, des billets au marché noir. Hiroshima mon amour était mot de passe.

Il n’y avait pourtant pas de vedettes sur scène; et sur l’écran seuls Paul Meurisse et Vittorio de Sica pouvaient, à la très grande rigueur, figurer les monstres sacrés du cinéma. Car personne n’oserait affirmer que les foules se déplaçaient pour admirer Martin Lasalle et Marika Green, Emmanuele Riva et Eiji Okada, Francisco Rabal et Marga Lopez, Soumitra Chatterji et Shamila Tagore, Zbigniew Cybulski et Eva Krzyzanowska, Toshiro Mifune et Misa Uehara. On courut voir Renoir, Bresson, Resnais, Bunuel, Ray et ses Indes, Vajda et sa Pologne, Kourosawa et son Japon. Pendant la semaine du Premier Festival international du film de Montréal, la rue Ste-Catherine résonna, souvent pour la première fois, de ces noms étranges.

Pour la première fois, Montréal découvrait la vitalité du cinéma indien et beaucoup rencontraient une Inde sortie des clichés faciles avec lesquels on habille tous les peuples dits sous-développés. La Pologne traversait le rideau de fer, le Japon affichait les légendes épiques et truculentes de son Moyen-Age.

Ce fut aussi un arrêt au milieu d’une grande diète, une pose dans le carême qui nous est imposé. Tous les grands noms que l’on retrouve aux trophées de Cannes et de Venise, aux rares exceptions qui confirment la règle, ne sont jamais isncrits sur les frontons montréalais. Les revues, magazines et journaux français et américains nous en parlent; certains voyageurs se rendent à New-York… Mais à Montréal, inconnus. Or le Loew’s, 2,800 places, était plein pour Pickpocket et Cendres et Diamants. Cela ne prouve rien, cela ne veut pas dire grand chose, mais permet au moins de se poser quelques questions utiles, de formuler des hypothèses, comme disent les chercheurs. Voyez Hiroshima mon amour.

Avant que toute publicité soit lancée sous ce titre, tous les billets étaient vendus… Certes, il y avait le léger attrait du fruit défendu, mais quand même, il y avait au moins 2,800 montréalais qui avaient entendu parler de l’œuvre de Resnais.

Cinéma art mineur? Où est l’humanisme que d’aucuns prêchent, chez Feydeau ou chez Bresson et Bunuel? Avez-vous vu le théâtre Kabuki dont on parle si bien et que l’on voit si peu… La compréhension de l’œuvre de Resnais requiert-elle moins de sensibilité et d’intelligence que la compréhension de l’œuvre de Proust?

On peut aimer ou ne pas aimer le Monde d’Apu, on peut préférer Le Général Della Rovere à Cendres et diamants ou inversement, des esprits distingués ou avertis préféreraient Kanji Mizoguchi à Akira Kourosawa, on peut, avec grand chagrin, pleurer sur l’absence de Bergman ou d’Antonioni, mais nul ne peut nier l’importance du regard kaléidoscopique que ce festival permit de jeter sur diverses formes des humanismes de notre époque.

D’ailleurs, sur les films présentés, tout a été dit. Le festival répondait à un besoin, remplissait un tel vide qu’on s’en rend compte en regardant la place que lui accorda la presse locale. A l’étranger The New York Times le consacra événement cinématographique majeur; Le Monde y ajouta le prestige de MacLaren; Variety, la plus importante revue mondiale de la corporation cinématographique, parla de ce «premier festival de la Côte Est de l’Amérique du Nord» comme «l’événement culturel majeur de l’été à Montréal»; le New York Film Bulletin écrivit que c’est à New-York qu’aurait dû être présenté pareil programme.

Tout le monde fut content, et les finances du gouvernement provincial additionnèrent, avec les droits de censure, les milliers de dollars de la taxe d’amusement.