lundi, septembre 28, 2009

Critique-nostalgie

«Si le cinéma de demain devait ressembler au film de Brault et Jutra, l’Art ne serait plus que la résultante de complaisances gratuites, l’Art n’aurait plus de fondement dans la réalité, bref il n’y aurait plus d’Art.»

Pour peu qu’on se souvienne de la revue québécoise sur le cinéma Objectif, l’article «L’Équipe française souffre-t-elle de «Roucheole»?» publié en août 1962 est l’un des plus marquants de l’histoire de ce magazine. On reconnaît le ton très engagé d’une jeunesse cinéphile fougueuse qui cherche à définir son cinéma. Il y a là un idéalisme esthétique (et très moral) à coups de «on ne veut pas de ce cinéma-là» qu’on verra se convertir au politique une décennie plus tard (Vallières sur Brault en est un bon exemple).

Il paraît que Jean Pierre Lefebvre s’est fait des ennemis durables à ce moment-là. On peut facilement le croire. Ironiquement, un peu comme si le destin avait vengé Brault, son œuvre est déjà en coffret-souvenir alors que Lefebvre attend toujours le sien. En passant, Lefebvre a terminé le tournage de La Route des cieux qui devrait sortir prochainement.

L'article complet «L’Équipe française souffre-t-elle de «Roucheole»?» sur Cinépars.

dimanche, septembre 27, 2009

Falardeau le misanthrope sublime


«Je suis un homme d’un autre siècle. Je chauffe au bois. Je n’ai pas d’ordinateur. J’écris à la main, avec un crayon à mine ou une plume. En art, je crois à la simplicité. Je chasse à l’arc. Je me bats pour la liberté, la liberté sous toutes ses formes, la mienne, celle de mon peuple, celles de tous les peuples. Bref, je suis un primitif égaré.»

Le 4 septembre dernier j’apprenais au hasard d’un article du JdeQ que Falardeau avait le cancer.


«Falardeau, absent
Le cinéaste Pierre Falardeau aurait reconsidéré sa participation à l'événement, mais il a confirmé au Journal qu'il ne sera pas à Québec la semaine prochaine en raison de son état de santé, souffrant d'un cancer. «Je serais allé là avec grand plaisir parce que je suis content que quelqu'un fasse quelque chose. Je vais laisser la chance à d'autres. Je suis malade comme un esti de chien, mais je suis encore capable d'en faire chier une couple», a-t-il répondu, préférant être discret sur sa maladie. »

Discret, tu parles s’il était discret. Trois semaines plus tard il en est mort.

Il me manquera beaucoup, je dirais même qu’il nous manquera beaucoup, et encore plus à ceux qui le méprisent. J’aimais sa façon tout sauf subtile de traiter les emmerdeurs de téteux, d’imbéciles, de clowns, d’ordures, de trous d’cul, de niaiseux, de faux culs et j’en passe. Mais il y a plus que des insultes.

Toute sa vie, il a cherché à demeurer intègre, à défendre ce qu’il pensait, ce qu’il était, comme Québécois et comme cinéaste. Un résistant, un vrai. Pas de ceux qui exigent de faire emballer leurs saucisses dans un plat recyclable et qui ferment le robinet en se brossant les dents : sorte de mièvre résistance «à base de kiwi, de yoga et de oui-oui» (merci Leloup). Il était contre toute invasion de la pensée, contre l’abrutissement des masses. Contre la société aseptisée. Qui d’autre pour oser dire en ondes - la cigarette au bec (alors que c’est devenu le Mal), les running shoes aux pieds, avec un accent de bûcheron - que notre société est aseptisée?

Tu as été un boxeur exemplaire Pierre Falardeau, beaucoup sont contents de pouvoir raccrocher tes gants, mais personne ne pourra oublier de sitôt ton courage et ta pugnacité.